Un accueil chaleureux: Intégration économique et sociale/communautaire des immigrants au Canada


Raisonnement par rapport aux politiques et pratiques

Des termes tels que « sous-classe immigrante », « enclaves ethniques », et « communautés parallèles » sont maintenant de plus en plus souvent mentionnés dans les débats sur l’intégration des immigrants au Canada et ailleurs dans le monde. Par exemple, Jason Kenney, ministre canadien de Citoyenneté et Immigration, a récemment dit : « Nous voulons éviter d’avoir le type d’enclaves ethniques ou de communautés parallèles qui existent dans certains pays européens. ». Cependant, les manières d’éviter ce genre de résultats ne sont pas complètement comprises ou connues. L’objectif de cette recherche est de contribuer aux connaissances déjà existantes sur cette problématique.

 

L’intégration des immigrants dans les sociétés d’accueil relève d’un processus multidimensionnel. Une intégration complète et approfondie implique une intégration dans trois grands domaines : 1) le domaine institutionnel; 2) le domaine économique; et 3) la sphère sociale/communautaire. L’intégration dans la sphère institutionnelle se réfère à la capacité des immigrants de devenir des citoyens fonctionnels de plein droit, sans faire face à des barrières systémiques émanant des structures et fonctionnements des grandes institutions comme l’éducation, le système de santé, la justice, la police, etc. L’intégration dans la sphère économique a trait à la capacité des immigrants d’entrer sur le marché du travail et de trouver un emploi correspondant à leurs qualifications, formation, et diplômes. L’intégration dans la sphère sociale/communautaire concerne la capacité des immigrants à développer des liens sociaux et à avoir des interactions sociales significatives et fructueuses avec la population née au Canada. De telles interactions peuvent avoir lieu dans le voisinage, le lieu de travail, les écoles, etc. Un groupe immigrant bien intégré ne fait face à aucune barrière institutionnelle, à aucun désavantage sur le marché, et à aucun isolement social.

 

Les processus d’intégration dans ces trois sphères ne sont pas de simples réflexions les unes et des autres. Autrement dit, au moins du point de vue théorique, il est possible pour les immigrants de bien s’intégrer dans une sphère mais pas dans les autres. Par ailleurs, l’intégration dans un de ces trois domaines n’est pas indépendante de l’intégration dans les autres. Par exemple, l’intégration dans un environnement institutionnel accommodant pourrait faciliter l’intégration dans la sphère économique. Une illustration de ce cas peut être trouvée dans l’impact des législations sur l’équité en matière d’emploi concernant les immigrants issus des minorités visibles. Au même titre, l’intégration dans le secteur économique peut promouvoir une vision plus positive au sein des immigrants du Canada et des Canadiens nés au pays. En outre, un profil économique plus fort d’un groupe immigrant peut augmenter son influence sur les lois gouvernant les structures et fonctionnements des institutions publiques. L’objectif de cette proposition de recherche est d’étudier les influences mutuelles de l’intégration dans les sphères économique et sociale/communautaire.

 

Cadre conceptuel et théorique

L’hypothèse de base de cette étude est la suivante : plus fort est le degré d’intégration des immigrants dans chacune de ces deux sphères, plus forte est leur intégration dans l’autre. Par ailleurs, on pose comme hypothèse que dans les premières années après l’arrivée au Canada, les expériences positives des immigrants dans la sphère économique – i.e. l’intégration économique – généreront parmi eux des vues positives du Canada et de la population née au pays, et augmenteront leur volonté de s’intégrer dans la vie sociale/communautaire canadienne. En retour, leur acceptation dans la sphère sociale/communautaire par les Canadiens nés au pays renforce leur intégration économique au fur et à mesure des années. Inversement, l’incapacité de la société hôte d’accueillir les immigrants dans la sphère sociale/communautaire se traduira au final par des difficultés pour les immigrants dans la sphère économique, et pourrait éroder leur volonté de s’intégrer dans la vie sociale et communautaire canadienne.

 

L’intégration dans la sphère sociale/communautaire peut se réaliser à différents niveaux, du plein engagement des immigrants dans la vie communautaire et civique à l’acceptation d’un tel engagement par la population d’accueil, en passant par des interactions sociales dans des réseaux sociaux comprenant immigrants et Canadiens nés au pays, et par l’absence de stéréotypes négatifs dans chaque groupe envers les uns et les autres. D’un autre côté, l’intégration économique peut varier selon la possibilité pour les immigrants d’occuper un emploi en fonction de leurs qualifications, l’absence de discrimination envers eux, et une expérience de travail plaisante dans les relations avec les collègues. Les questions sur lesquelles cette étude porte concernent les relations mutuelles entre ces deux ensembles d’indicateurs, tout en utilisant un cadre conceptuel/théorique éclectique qui se fonde sur les récentes recherches sur cette problématique réalisées dans de nombreuses disciplines telles que la sociologie, l’économie, la psychologie sociale, la science politique et les sciences religieuses par exemple.

 

Questions de recherche

De manière spécifique, voici les questions auxquelles s’intéresse cette recherche :

  • Quelles relations existent entre l’intégration économique, sociale et civique des immigrants?
  • Quel rôle le capital social et l’attachement local et communautaire jouent-t-ils dans l’intégration économique?
  • Quel rôle l’intégration économique joue-t-elle dans l’intégration sociale des nouveaux arrivants et leur sentiment d’appartenance à la communauté locale et au Canada?
  • Est-ce que les investissements dans l’intégration sociale (par exemple les liens communautaires) ont des effets sur d’autres aspects de l’intégration, y compris l’intégration économique?
  • Est-ce que l’intégration sociale, économique et civique se déroule de la même façon pour différents groupes religieux, ethniques et culturels? Si oui, quels sont les facteurs en jeu et quelles en sont les implications pour les programmes?
  • Est-ce que ces expériences sont différentes suivant les villes, les provinces? Si oui, quels facteurs contribuent à ces différences? Y a-t-il des différences entre les expériences des immigrants vivant dans des petites villes et ceux vivant dans des grandes villes?
  • Est-ce que l’intégration sociale, civique et économique se déroule différemment dans un contexte minoritaire (par exemple les communautés francophones en situation minoritaire)?
  • Comment est-ce que les résultats de recherche pourraient être traduits en politiques, programmes et pratiques?

 

Description du projet et approches possibles

Les questions de recherche susmentionnées seront étudiées au moyen de plusieurs méthodes, y compris des méthodes quantitatives et qualitatives de collecte de données. Les sources de données sont les suivantes : les enquêtes existantes menées par Statistique Canada et d’autres agences publiques et privées, des groupes de discussion, et des entrevues face-à-face avec des immigrants et des Canadiens nés au pays. Les lacunes possibles identifiées durant la première phase seront comblées dans un deuxième temps en réalisant de nouvelles études. Le projet se servira également de données provenant d’autres pays d’immigration, tels que les États-Unis, l’Australie et plusieurs pays d’Europe occidentale. La nature comparative du projet permettra d’identifier les histoires à succès et de s’en servir pour proposer des développements en matière de politiques et programmes.

 

 

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